Vous opériez une société par actions faisant affaires comme entrepreneur électricien. Vous étiez deux actionnaires à parts égales. Vous étiez seul administrateur. La société a mis fin à ses affaires il y a deux ans, en raison de difficultés financières l’ayant contrainte de faire faillite. Vous avez reçu il y a quelques mois, à votre attention personnelle, une décision de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) vous réclamant une somme de plusieurs milliers de dollars pour des cotisations impayées par la société qui employait à l’époque plusieurs travailleurs. Vous avez contesté cette décision devant la Direction de la révision administrative de la CNESST, laquelle a confirmé la décision initiale. À la suite du dépôt de votre contestation, une audition est prévue devant le Tribunal administratif du travail (qui remplace la Commission des lésions professionnelles). Vous envisagez de faire valoir que le non-paiement des cotisations était de la responsabilité du comptable à qui la société confiait la gestion de l’entreprise, incluant notamment le versement des déductions à la source. En effet, vous vous en remettiez entièrement à lui et jamais vous n’aviez eu connaissance que les sommes n’avaient pas été versées à la CNESST. Quelle est la valeur de cet argument?

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Cet argument est plutôt faible.

D’abord, rappelons que la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles prévoit que :

323.2. Lorsqu’un employeur qui est une personne morale a omis de payer une cotisation, ses administrateurs en fonction à la date de l’omission deviennent solidairement débiteurs avec celui-ci de cette cotisation ainsi que des intérêts et pénalités s’y rapportant dans les cas suivants :

1° lorsqu’un avis d’exécution à l’égard de l’employeur est rapporté insatisfait en totalité ou en partie à la suite du dépôt d’un certificat de défaut en vertu de l’article 322;

2° lorsque l’employeur fait l’objet d’une ordonnance de mise en liquidation ou devient failli au sens de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (L.R.C. 1985, c. B-3) et qu’une réclamation est produite;

3° lorsque l’employeur a entrepris des procédures de liquidation ou de dissolution, ou qu’il a fait l’objet d’une dissolution.

Comme en matière fiscale, il est permis à l’administrateur de se dégager de cette responsabilité, à certaines conditions :

323.3. L'article 323.2 ne s'applique pas à un administrateur qui a agi avec un degré de soin, de diligence et d'habileté raisonnable dans les circonstances ou qui, dans ces mêmes circonstances, n'a pu avoir connaissance de l'omission visée par cet article.

Or, il faut en faire la preuve, comme le Tribunal administratif du travail (TAT) l’a expliqué dans quelques récentes décisions, dont une rendue le 13 juin dernier :

« L’administrateur ne peut donc pas se fier à ses professionnels ou aux employés qui l’entourent ni à une croyance ironique, telle « Le syndic s’occupe de ses paiements ». Il doit démontrer qu’il a mis en place des moyens de vérification des services rendus par ses employés ou le syndic et s’assurer que ces personnes remplissent leurs obligations. L’administrateur doit démontrer qu’il a mis en place des contrôles pour s’assurer que le travail accompli répond aux obligations fiscales. »

Dans une autre, le tribunal considère :

« considère qu’un administrateur diligent aurait posé des questions ou des gestes pour éviter que l’employeur ne se trouve dans une position où il ne peut assumer sa cotisation à la Commission. Peut-être que ces gestes ou questions n’auraient pas suffi à éviter la situation dans laquelle se trouve l’employeur, mais à tout le moins, ils auraient témoigné des démarches et des préoccupations de l’administrateur pour éviter une telle situation. ».

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